jeudi 30 septembre 2010

Excusez-la! (Un spectacle blooper...)

Vous vous souvenez des mardis de Murphy???? Eh bien, la semaine passée, ce fut le retour de Murphy, toujours en cette dernière journée de semaine (le lundi cette fois-ci!).

Tsé, quand quelqu'un se blesse à deux heures du spectacle, ça part ben mal... Dans ces cas-là, on sait que la journée va être longue...

Lundi, c'est donc Tedros qui a été malchanceux. Le jongleur éthiopien a voulu faire un saut, mais son tendon d'achille a fait la grève et s'est taponné en boule dans son mollet. Ouch!!! Le cauchemar de la gigueuse! Et l'équipe de jongleurs a donc dû transformer son quatuor en version trio... tout juste avant le spectacle. Mention spéciale à Guy, que j'ai vu dans la salle de coiffure à 19h20 avec pas une once de couleur sur son visage... Moi le speed-make up, je connais pas trop!

Ça c'est l'introduction. Maintenant, que le spectacle commence...

Quand j'ai commencé à faire des représentations en 2008, j'étais surprise de voir à quel point les musiciens étaient infaillibles. J'avais fait part de ma remarque à Racheal, la flûtiste d'alors, qui avait démenti le tout vigoureusement. Puis, en écoutant bien (et souvent...), j'ai découvert qu'en fait, la musique n'était pas si uniforme que je le croyais. Eh bien, si j'avais encore eu des doutes en septembre 2010, ils se seraient tous évaporés gracieusement lundi dernier...

Rendu à peu près au tiers du Cityscape, on aurait dit que quelque chose ne tournait pas rond, ce n'était pas comme d'habitude... Je n'arrivais pas à dire exactement ce qui se passait, mais l'enchaînement me semblait soudain si nouveau... Après huit cents spectacles, ce n'est pas vraiment normal! Je ne reconnaissais pas ce que je faisais, ça ne coulait pas. Puis, en ouvrant mon parapluie pour la superbe chorégraphie finale, j'ai compris : il manquait un couplet de musique en entier!!! Ben oui, deux phrases de huit qui ont mystérieusement disparu dans le KosMos (c'est le nom de l'ours polaire de ZAIA! On a participé à un concours pour trouver, moi ma suggestion était : "Peu importe le nom, l'important c'est de le peindre en rouge et or parce que ça porte chance pour les Chinois!" On appelle ça la cuisine fusion!)! On ne sait pas trop qui, des chanteuses ou du chef des musiciens, a sublimé cette section musicale de la mémoire collective. Tout en faisant de banales steppettes avec mon parapluie, je me demandais ce qui allait se passer quand la chanson arriverait au bout de son rouleau avant nous, quand Boum!!! Fin de la toune, bruits de tonnerre, effets spéciaux simulant des éclairs, tous les artistes qui figent comme s'ils jouaient à "statue"... et les édifices du Cityscape qui continuent leur rotation... ben doucement... Encore un 'ti quart de tour... Envoye ma nouère...

Silence, malaise généralisé des deux côtés du quatrième mur, le cul au public avec mon parapluie en l'air, en attendant que ma tour revienne face devant, sti que le temps passe lentement des fois... Tentative de rattraper du côté des musiciens, quelques petites secondes de beat piston pour meubler le tout, un beau patinage musical. Quand, finalement, dans le silence, les édifices ont fini leur petit tour et ramené tous les artistes face au public, il n'y a pas eu d'applaudissements avant le prochain numéro. Pour une fois, je leur ai pardonné...

C'est drôle parce que ce jour-là, avant le spectacle, je discutais avec la maquilleuse du fonctionnariat artistique, communément nommé "routine". Je lui expliquais que je tenais à mes petits rituels comme : remonter mes faux cils avant d'entrer sur scène, faire mes exercices de pilates toujours au même moment dans les coulisses, vérifier systématiquement si je commence avec le pied droit ou le pied gauche, manger un bout de chocolat à 19h45 en allant installer mon micro, etc. Pas nécessairement par superstition mais plutôt parce que tous ces petits gestes font partie du spectacle même s'ils sont invisibles au public et que je dois les faire sans me poser de questions comme tous les autres moments chorégraphiques. Je lui racontais aussi comment je suis déboussolée quand je fais les choses un peu différemment. On devient si habitués à ce que tout se retrouve toujours à la même place, de la même façon... Comme les fourmis qui paniquent quand une brindille coupe leur chemin... Heureusement, la routine a son bon côté : récemment, j'ai eu un blanc de mémoire avec les paroles de la chanson de la finale. Et pendant que mon cerveau disait : "Ben voyons, c'est quoi le reste déjà?", ma bouche s'est placée toute seule en forme de "come li steelle de un vento d'azzuroooo". Fiou! Et là, sur le Cityscape, j'ai fait robotiquement la même chorégraphie que toutes les huit cent fois précédentes, mais ça me semblait si différent, juste parce que la musique était décallée. Je commence à manquer d'entraînement à l'imprévu... Parfois je me demande si je pourrai un jour me sortir ZAIA du corps, si je serai capable de danser autre chose après ce contrat...Vivement retourner au Vices et Versa pour improviser toute la soirée...

Pendant cette exhibition de popotins qui m'a semblé interminable, j'ai eu le temps de me souvenir de cette représentation où il y avait eu une alarme de feu durant le Cityscape. En plein milieu de la chorégraphie, les lumières s'étaient allumées sur scène et dans la salle, et aussi des petits clignotants blancs sur le muret du balcon, les édifices du Cityscape s'étaient soudainement immobilisés, une alarme avait rententi, wow! on aurait vraiment dit l'apocalypse! Finalement, le sous-sol avait juste fait une surdose de fumée parce que la machine à glace sèche avait fait du zèle. Tout de même, le temps que le spectacle reprenne, on était coincés sur nos petits édifices, le public et les artistes subtilement éclairés par des néons. Moi, j'étais toute seule sur ma petite tour en hauteur, je me suis assise en tailleur et je me demandais si je devais rester dans mon personnage sous les néons ou plutôt faire des bye bye aux spectateurs et jaser du dernier typhon... Bon, moi qui cherche toujours des façons d'enlever cette barrière entre les artistes et le public, j'avais été servie, me direz-vous... Reste que ça gâche la magie pas à peu près...

Fin de la digression.

Vous pensez que l'anecdote est terminée? Ben non! C'est juste le premier numéro! Après, le tout déboule comme une journée qui s'est levée du pied droit (ben oui, je suis gauchère des pieds, alors se lever du mauvais pied, c'est ce que ça veut dire pour moi!). Les jongleurs ne tiennent pas le coup avec leur bizounage de numéro terminé à 19h18, ils échappent une dizaine de quilles et plusieurs ballons vert fluo... Dans la section des lanternes, on a droit à des faces de bœuf record de la part de nos spectateurs chinois. Un seul mot me vient à l'esprit pour décrire leur air, désolé, il est en anglais : pissed off. Et y'a Zaia qui tombe sur les fesses, et le bruit du craquement de l'oeuf qui retentit avant que l'oeuf n'ait réellement été craqué...

Et y'a Attila qui veut sauver le show. Je le connais, c'est assez prévisible maintenant : quand il y a un problème technique quelconque dans le spectacle, Attila décide qu'il va patcher le tout et en mettre plein la vue à son public. Alors, pendant que la plate-forme monte sur scène, je l'entends dire à Eddy, le percussionniste : "Ok, we do faster, faster!". Attache ta tuque pis tes souliers, on va faire de la vitesse, Attila a le pied pesant ce soir! Sauvons les baleines, sauvons ZAIA! Quelques triolets trop vites et hop! les madames sont ben contentes. Mais ce soir, chez nous non plus ça ne tourne pas rond. La veille, on a changé le début de la chorégraphie, c'est encore tout frais (oh, la routine...) et Attila, saoulé de vitesse, en oublie sa partie. Mais je lui fais signe en ouvrant très grand les yeux et en hochant subtilement la tête, puis il se rattrappe et tout rentre dans l'ordre. Le bon côté de la routine, c'est aussi ça : quand tu connais tellement bien tes partenaires, tu peux leur parler seulement qu'avec tes yeux. Ouais! Bon, on n'a peut-être pas sauvé ZAIA, mais en tout cas on a eu des applaudissements bien sentis!

À la toute fin, chaque groupe salue, les pauvres jongleurs semblent un peu gênés, Silver hausse même les épaules, l'air de dire "vraiment désolé, on n'a pas bien performé aujourd'hui"... Avez-vous déjà vu ça, des artistes qui s'excusent en allant saluer? Ça fait vraiment pitié, les pauvres, ils ont fait de leur mieux pourtant, mais Murphy avait les commandes ce jour-là, que voulez-vous...

Dans le domaine du mémorablement raté, il y aura donc le 27 septembre 2010...

Le plus étonnant de toute cette histoire, c'est que malgré tout on a eu une ovation debout, il y a bien une bonne douzaine de personnes qui se sont levées pour nous. Wow, même à Noël on n'a pas ça! In-croy-yable!!!!

...Excusez-la!

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