lundi 4 octobre 2010

La Poque d'Or (blooper du 4 octobre)

Quand je dis que tout fout le camp si je fais un pas en-dehors de la routine, il faut me prendre au mot...

Ç'a commencé au premier spectacle quand j'ai marché sur mon lacet en descendant de l'échelle et que j'ai dû faire tout le passage des lanternes avec un lacet détaché. C'était la première fois en plus de deux ans qu'un noeud se défaisait. J'aurais dû me douter qu'il s'agissait d'un présage et que bien pire m'attendait au deuxième spectacle...

Ainsi donc, dans cette deuxième représentation, comme toutes les huit cents fois précédentes, je m'apprête à sauter en bas de la scène avec ma lanterne pour aller cherche mon frère "mouru" (sic) entre les allées. Juste avant de descendre, je regarde mes pieds et je me dis : "Tiens, je ne suis pas placée comme d'habitude." Je ne sais plus trop ce qui était différent au juste, si c'est le pied droit en avant au lieu du gauche, ou le corps complètement tourné vers le public plutôt que de biais, ou le fait que j'aie donné au voltigeur la lanterne qui était dans ma main gauche plutôt que celle de la main droite... Bref, je remarque que je fais les choses différemment en ce 4 octobre 2010 et je repense à ce que j'ai écrit sur le blogue il y a quelques jours au sujet du robotisme artistique dont je suis parfois victime et de l'incompétence de mon corps à performer une tâche ne serait-ce que légèrement modifiée. Et, cérébralement, ironiquement, je me dis : " Je me demande si quelque chose va se passer à cause de ça, et si je t..."

Je n'ai pas eu le temps de finir ma phrase mentale que la fibre de verre de mon soulier (gauche, étrangement...) reste prise dans le bord de la scène, pendant que ma jambe droite, en bonne jambe droite qui fait ça sans faille depuis deux ans, continue son travail de moteur à marche et descend de la scène comme d'habitude. Sauf que, la pauvre, elle ne tient pas le coup avec cette chute plutôt brutale de trois pieds de haut où sa copine de gauche reste coincée en l'air en une arabesque douteuse. "Non mais ça va pas", qu'elle me dit, "je ne suis pas flexible comme ça, moi! On ne travaille pas pour le Cirque du Soleil quand même!" Je perds littéralement les pédales et je déboule l'allée, inclinée à 45 degrés, les pattes qui patinent en arrière, mes souliers fibrés qui font tout un boucan qui n'a rien à voir avec la musique suave que jouent les musiciens, et ma lanterne qui se balance frénétiquement devant moi comme un pendule qui veut rattrapper le temps perdu! Non, c'est pas vrai! Mais quelle honte!!! Pour faire exprès, je suis la première qui descends de scène, presque au centre, avec les autres qui me suivent derrière, et il n'y a absolument rien qui se passe de ce côté-là. Tous les spectateurs de la section centrale n'ont donc rien eu de mieux à faire que de me regarder trébucher royalement en bas de la scène! Quand je remonte enfin de ma chute, l'air on ne peut plus sérieux et impassible, je réalise qu'effectivement, plusieurs Chinois se bidonnent de mes déboires... Oh, quelle honte, quelle honte, quelle honte!!! Ça doit être ça qu'ils appellent "perdre la face"... Ou dit-on plutôt "perdre pied"?... Alors, pour une fois, je suis bien contente qu'à ma droite se trouve une section complètement vide! Je tourne le dos aux gens du centre qui rigolent et me pointent du doigt et j'éclaire plutôt ces sièges inoccupés jusqu'à ma pause-raquettes...

Rendue un peu plus haut, quand je suis assez loin pour qu'il y ait une chance qu'on n'ait pas remarqué mon plongeon, j'affronte enfin le regard des spectateurs et je reprends mon rôle de chercheuse de cousin perdu dans le public, l'air dramatique malgré le rire qui me secoue intérieurement (c'est drôle, autant hier j'étais fâchée et j'essayais de défoncer le Cityscape avec mes talons tout en exhibant mon plus large sourire, autant aujourd'hui je masque mon fou rire par un visage faussement triste...). Pendant ce long cortège à la lanterne jusqu'au fond du balcon, je glousse de rire et je me cache de honte en souhaitant très fort qu'il fasse assez noir pour que personne ne me reconnaisse quand je reviendrai sur scène faire la gigue avec Attila... "Heille, as-tu vu la fille qui fait les steppettes super vite? C'est pas elle qui s'est plantée y'a dix minutes? Ah, t'as raison... Ça doit pas être elle d'abord..." Hum...

Pour en revenir à nos moutons routiniers, l'histoire m'a tellement déconcentrée d'un bout à l'autre du spectacle qu'en entrant pour la finale, à peine sortie de la coulisse, j'ai commencé tout de suite à chanter et faire mon taï-chi accéléré, pendant que mes collègues se balançaient en cadence en prenant place à l'avant-scène... Ben voyons, que cé que j'fais là, moi? Comme le disait si bien Windows, mesdames et messieurs : "Une erreur fatale s'est produite." C'est peut-être l'heure de mettre mon anti-virus à jour...

En plus d'être sublime à raconter sur le blogue et encore plus délectable dans sa version live mimée (sur commande seulement), l'aventure me laisse avec un bleu tridimensionnel sur le tibia gauche. Ayoye! Dur dur de giguer comme il faut avec un os en compote...

Ainsi donc, je décerne à ce blooper le prestigeux prix de la Meilleure ratée de l'année :
la Poque d'Or!!!!!
Toutes mes félicitations madame la Gigueuse d'avoir remporté la Poque d'Or 2010.

... Monumentalement glorieux, n'est-ce pas?

1 commentaire:

CélineT a dit...

Hilarant! En plus, en plein "golden week" chinois! Ça, Madame, s'appelle avoir du "timing"!

Moi, je te décerne le "Blogue d'Or" !!!